A mon geste défendant: Essais de théorisation alternative sur le handicap physique

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Ce blog est né d’une nécessité que je ressentais. Il va tenter, au fil des articles publiés, d’élaborer une réflexion alternative sur le handicap physique et de mettre des mots sur certains impensés à propos du handicap. Mon propos ne concernera que le handicap physique, parce qu’il repose sur ma propre expérience de personne handicapée physique. Il sera également marqué par diverses influences, notamment la pensée féministe et la théorie queer ; mais je ferai également un tour du côté des subaltern studies, les post-colonial studies, voire les porn studies.

Cela faisait longtemps que je pensais faire ce blog. Mais de multiples raisons m’en ont empêché. La principale, c’est que je m’ennuie à parler de handicap. je préfère parler littérature, philosophie, théorie politique ; ou même de la dernière soirée que j’ai faite, du dernier apéro que je me suis enfilé, du dernier sex-toy que j’ai acheté… mais, comme je l’ai dit, il m’a paru nécessaire de dépasser cet ennui profond et de prendre la parole.

Pendant longtemps, j’ai été écartelée entre deux questions. D’un côté, il y a cette injonction à parler, que je ressens d’autant plus forte du fait de ma conscience politique forgée dans le féminisme et les luttes LGBT et parce que j’ai ce bagage culturel, politique et militant qui me le permet. D’un autre côté, il y a le risque de réduction de tout être qui prend la parole.

C’est là, je trouve, un des dangers de la démarche militante. Je ne veux pas m’afficher comme un porte-étendard et, ainsi, être réduite au et à mon handicap. Comme je dis toujours : « le porte-étendard, c’est ce mec un peu con qui, sur le champ de bataille, est trop visible et qui est toujours le premier à se faire flinguer. ». J’ai passé l’âge de vouloir mourir pour des idées et être enterrée sous la pierre d’une vision monolithique de moi-même. Cette tendance à la réduction est d’autant plus dangereuse, voire contre-productive, quand elle s’applique au handicap. En effet, le handicap physique se rapporte au corps et le corps est le support le plus proche de l’identité (Kaufmann, 1998). Le handicap trompe l’œil des logiques de domination qui ne voit en l’être handicapé que son handicap et réduit son existence entière à l’immobilité, à la passivité, à la faiblesse. Un corps sans pouvoir, sans puissance.

Je voudrais donc m’affirmer dans toute ma complexité d’être et je me méfie de certain militantisme. Toute la question est de savoir si un militantisme efficace et compréhensible peut ne pas tomber dans les affres d’une vision simpliste.

Une amie éclairée, avec qui je discutais de cela, me disait : « Tu peux choisir les formes de prises de parole. ».
Je veux croire qu’elle a raison ; que l’on peut donner à nos gestes les significations que l’on désire. Je conçois donc ce blog comme un acte d’empowerment. Ma capacité d’agir est dans mes phrases et dans mon corps. J’affirme haut et fort ma puissance d’être qui pense, qui danse, quand on me voudrait comme un triste lambeau de peau inapte à tout.

Bienvenue et bonne lecture.