La revanche de la graisse ? Évolution des techniques et des imaginaires

La revalorisation du matériaux graisse du point de vue médical, ça décale le point de vue…
un article d’Eva Carpigo
https://tc.revues.org/7881

Résumé : La graisse reste dans les imaginaires contemporains un élément ambivalent, une substance phénoménologiquement dégoûtante de par son absence de forme, et dangereuse par sa capacité à déformer l’apparence. Des imaginaires dystopiques s’associent à une graisse qui proliférerait irréversiblement. La graisse demeure une matière parasitaire. Reléguée au statut de « pourriture » et « déchet » organique, depuis l’Antiquité, la graisse fait l’objet d’acharnements techniques qui visent à la retirer du corps humain. Néanmoins, nous sommes confrontés aujourd’hui à la naissance de procédés qui revalorisent cet élément. La découverte de cellules-souches dans le tissu adipeux témoigne d’un tournant culturel qui fait de la graisse un « or lipidique » à stocker dans des biobanques. D’un côté fleurissent des collectifs de médécins visant à approfondir les particularités de cet élément et, notamment, ses applications thérapeutiques. De l’autre, les sciences humaines et sociales font émerger le courant interdisciplinaire des « fat studies ». Par la présente contribution, je propose de parcourir une histoire des techniques et des imaginaires liés à la graisse, qui mettra en relief les correspondances entre le développement des pratiques d’épuration et de recyclage de la graisse, ainsi que les revendications des mouvements sociaux « /fat acceptance/ ».