Mineurs de Calais : sortis de la boue, mais pas de l’arbitraire

Les pouvoirs publics s’apprêtent à disperser la plus grande partie des mineurs isolés de la jungle de Calais, à l’instar du sort qu’ils réservent aux adultes, dans des centres provisoires disséminés un peu partout en France.

Au motif d’une urgence que seule l’incurie des services de l’État et du département a provoquée, il est maintenant question d’envoyer un millier de mineurs dans des centres ouverts dans l’urgence, en dehors du dispositif prévu par les textes, sans agrément des départements, avec un encadrement éducatif au rabais.

Une proposition de cahier des charges présentée par les ministères de l’intérieur, du logement et de la justice à plusieurs associations précise les missions et les modalités de fonctionnement de ces futurs « centres provisoires de mise à l’abri spécialisés pour mineur non accompagnés » (voir ci-dessous).

Les équipes de ces centres pourront procéder à une évaluation sociale de l’isolement et de la minorité en dehors de tout cadre légal puisque ces jeunes ne seront, à ce stade, ni confiés aux services de l’aide sociale à l’enfance d’un département ni signalés à l’autorité judiciaire. Ceux déclarés majeurs seront renvoyés dans des centres pour adultes, sans autre forme de procès.

Les autres, dans l’attente d’une hypothétique prise en charge par un département et un nouveau transfert, seront « sensibilisés à l’apprentissage du français » et se verront « proposer des animations éducatives », une manière de dire qu’ils seront privés de scolarisation.

Comme tous les dispositifs de mise à l’abri temporaire de mineurs isolés créés ces dernières années, celui-ci constituera une relégation en marge du dispositif du droit commun de la protection de l’enfance.

Et on peut craindre qu’à dix-huit ans, alors qu’ils n’auront été ni pris en charge par l’aide sociale à l’enfance ni scolarisés, ce ne soit vers des centres de rétention administrative qu’ils soient dirigés.

Le 23 octobre 2016